L’USMA refuse la délocalisation des audiences

L’article L. 512-1 III du code de justice administrative, même s’il n’est pas encore appliqué, prévoit la possibilité, en cas de placement de l’étranger en rétention, que le juge administratif, si une salle attribuée au ministère de la justice lui permettant de statuer publiquement a été spécialement aménagée à proximité immédiate au lieu de rétention, statue dans cette salle.

L’USMA, qui a organisé à ce sujet un mouvement de grève le 9 février 2011, est opposée à cette « délocalisation des audiences ». Nous avons donc décidé de nous engager aux côtés de nos homologues judiciaires, qui se voient actuellement appliquer des mesures similaires, au sein du « Collectif anti-délocalisations ».

Nous pensons en effet que la justice, rendue par des magistrats au nom du peuple français, et qui ne saurait être assimilée à un recours administratif hiérarchique, doit être rendue dans une juridiction, dans un lieu dédié et solennel, seul à même d’assurer la sérénité des débats et l’autorité de la justice administrative. A défaut, l’intelligibilité même du procès administratif est mise à mal (d’autant que le juge administratif siège en tenue civile, ce qui ajoute encore à la confusion). De plus, le respect du principe de publicité des audiences ne peut pas davantage être assuré compte tenu de l’implantation périphérique de la quasi-totalité des centres de rétention et l’absence ou presque de transports en commun, rendant excessivement difficile l’accès du public à de telles salles. Une telle mesure expose aussi le juge administratif aux pressions administratives et porte ainsi atteinte à son indépendance vis-à-vis de l’administration d’accueil. Enfin, en pratique, tenir des audiences dans des centres de rétention impliquerait, pour le juge administratif, des temps de déplacement et des délais très contraignants, sans qu’aucune mesure de compensation n’ait été prévue.

Aujourd’hui, la création de deux nouvelles salles d’audience délocalisées, destinées aux juges judiciaires, est prévue au bord des pistes de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle. Parce que l’USMA est opposée au principe même d’une telle délocalisation, et ne se fait guère d’illusion sur le fait que, demain, les prochains concernés par de telles délocalisations seront les magistrats administratifs, elle s’est engagée dans le combat mené par le « Collectif anti-délocalisations » (dossier de presse ci-joint) et a participé à diverses actions  :
-  publication dans le journal Libération du 6 juin 2013, d’une tribune commune intitulée « Défendre et juger sur le tarmac »,
-  lettre ouverte adressée à Mme le Garde des Sceaux le 21 mai 2013 qui, par sa réponse du 18 juillet suivant (ci-jointe), « comprend l’inquiétude des professionnels » mais n’entend pas revenir sur cette création
-  rencontre avec MM. Delarue, contrôleur général des lieux de privation de liberté, et M. Fekl, député, le 4 septembre 2013
-  visite en bus, avec des parlementaires, journalistes et personnalités médiatiques et politiques, des futures salles d’audience délocalisées, le 17 septembre 2013
-  publication d’un communiqué de presse le 10 octobre 2013 (ci-joint)

L’USMA est déterminée à poursuivre ce combat contre les audiences délocalisées : il en va de nos conditions de travail, de notre indépendance et de la qualité de la justice !